Tous les matins je prends le métro, si je démarre ma journée en voiture, à vélo ou à pied je sens que je me détourne du vrai chemin de mon existence.
Le métro n'est pas un moyen de transport, mais un monde à part entière. Sa population est variable, à en croire les recherches,et dépend de ce qui arrive dans cet autre monde nommé « extérieur » mais qu'on comprend plus souvent comme la « réalité ».
Le métro est un microsystème autosuffisant et possède des règles physiques bien propres. Nous constatons, lors des « heures de pointe », que deux corps occupent un même espace. Attention n'écrivez jamais cela dans un contrôle scolaire, les règles physiques ne sont pas encore pensées pour des mondes alternatifs comme celui du métro, elles nous aident seulement à comprendre les événements de la réalité.
Le métro abrite une faune diverse : des astrologues, des oracles, des alchimistes, des artistes de tout genre, des alcooliques, des psychologues, des docteurs en sociologie, des avocats, des conférenciers..Néanmoins, quelques régions présentent une population négationniste : ils croient être dans le monde réel et refusent d'accepter les lois qu'impose le métro, de ce fait ils ont toujours l'air de souffrir. Ces personnes là ne restent pas plus de trois stations dans le métro. Si contraintes de faire un trajet plus long, s'ensuivent les évanouissements, la perte de discernement et parfois de mémoire. Il est fortement déconseillé de les exposer à « l'extérieur » avant qu'ils n'aient repris conscience et puissent prendre l'escalator par eux mêmes.
Les personnes dans le métro pensent aller d'un endroit à un autre, c'est à dire, elles croient se déplacer. Mais cela n'arrive que rarement, ou jamais. Rien de nous prouve que ce n'est pas la ville qui change de place pour s'accommoder à nos besoins, pendant que nous tournons en rond dans le simple but de sentir qu'on se déplace, qu'on bouge, qu'on va quelque part.
Le métro nous donne l'illusion de choisir notre chemin, mais celui-ci est déjà tout tracé. Il nous mène toujours à la case départ, au début de tout les temps, de nous mêmes, de notre mémoire, de notre fatigue, de notre joie, de notre désespoir...
Un de ces matins je me suis assise à ma place préférée dans le métro et j'ai commencé à lire. Mon livre est un monument, ses 600 pages pèsent une tonne, je n'ai même plus de place pour ranger mon goûter ou un simple parapluie. J'ai tout lu, je suis restée à ma place ce qui m'a semblé une demi heure, je suis sortie du wagon sans trop regarder la station et j'ai émergé au beau milieu d'une place inconnue et pourtant familière. Les personnages de mon roman se promenaient en ville, nous étions en Libye, moi qui ne suis jamais sortie de mon bled j'étais surprise de savoir cela. Mon destin se révélait, peut-être, enfin.
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